Argentine - Buenos Aires sous la menace du paco
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Dans la banlieue de Buenos Aires, des quartiers livrés à l’abandon ont vu se répandre la consommation de paco, une drogue très peu chère qui tue de plus en plus d’adolescents. Un collectif de mères a décidé de prendre en main ces enfants et d’interpeller le gouvernement.
Une mère enlace fièrement son fils croisé par hasard, dans la rue. Lui, les yeux hagards, un rictus aux lèvres, se fige et l’embrasse à son tour. Maintenant, il sourit. Maria Miyerba est membre du collectif Los madres contra el paco, les mères contre le paco. À La Matanza, un quartier défavorisé de Buenos Aires, elles sont une dizaine, comme elle, à tenter d’alerter les pouvoirs publics sur cette drogue dévastatrice et comparable au crack. Fumé à la pipe et élaboré à partir des restes du processus de production de la cocaïne, le paco est souvent associé à des matières dangereuses comme le kérosène ou l’acide sulfurique. Le docteur Juan Yaria, psychologue spécialisé dans l’addiction, dénonce « une véritable épidémie ». Il affirme que dans certains quartiers, 80 % des jeunes en sont dépendants.
Estella Maris, la meneuse des madres contra el paco de la Matanza, nous montre plusieurs voitures entièrement désossées par les jeunes qui revendent les pièces pour s’acheter leur dose. Dans cette ville limitrophe de la capitale qui compte un million deux cent cinquante mille habitants, certaines rues ne sont pas goudronnées, les maisons sont insalubres et la drogue se vend aux yeux de tous. C’est dans une de ces ruelles jonchées de bris de verres et gagnées par les herbes folles que les madres rencontrent cet après-midi de mars un groupe de jeunes.
La discussion s’engage immédiatement tandis qu’un adolescent famélique s’assied à l’écart pour fumer sa pipe. Au centre du groupe, Diego Jaimes, 23 ans, n’a pas assez de mots pour critiquer le paco : « Il t’enlève toute honte, tu peux voler ta mère, ton frère, ton voisin, tu t’en fiches. » Il assure avoir arrêté et remercie le petit groupe de femmes : « C’est génial ce qu’elles font, c’est très courageux car tout le monde a peur des drogués. »
Une fois par semaine, elles quittent leur quartier pour gagner le centre de Buenos Aires après une heure trente de bus. Comme les mères de la place de Mai qui manifestent chaque jeudi pour obtenir la vérité sur leurs enfants disparus pendant la dictature (1976-1983), elles tentent d’attirer l’attention des locataires de la Casa Rosada, la Maison Rose, siège du pouvoir. Coiffées d’un fichu noir en signe de deuil pour les enfants perdus, elles brandissent des pancartes : « Fini la drogue ! », « Paco = génocide », « exclusion = État absent = violence et mort. »
Pauvreté
Le paco séduit les personnes les plus démunies pour son faible coût. À Buenos Aires, la dose se vend 2 pesos (40 centimes d’euros). Le chercheur en psychologie politique Hugo Adrián Morales (1) souligne le lien entre l’arrivée du paco en Argentine, en 2001, et la crise économique que traversait alors le pays : « En 2001, le pourcentage de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté tournait autour de 25 %, tandis qu’en octobre 2002 il atteignait 57,5 %. »
Autre relation troublante selon le chercheur en psychologie, plus de la moitié des personnes pauvres en Argentine ont moins de 22 ans, et la dépendance à la pasta base, autre nom du paco, atteint en majorité cette catégorie d’âge. « C’est une peste, qui touche les enfants dès leur plus jeune âge, à 8, 9 ou 12 ans. Il est en train de gagner toutes les couches de la société argentine, même les beaux quartiers », constate Marta Ines Rugolo, psychologue en charge de la santé mentale à l’hôpital Carlos Durand de Buenos Aires.
Le fils aîné d’Estella Maris se souvient qu’il a pris sa première dose quand il était tout petit, à l’âge de 7 ans. Mais c’est à l’âge adulte que les ravages se sont fait sentir. Aujourd’hui, après un an et demi de cauchemar lié à la drogue, Esteban Royón Guillen suit un traitement auprès d’une ONG, la Fundación Reecuentro ( Fondation retrouvaille ). Sa mâchoire se crispe et son regard s’enflamme lorsqu’il évoque l’enfer qu’il a vécu. « J’avais tout et le paco a tout détruit, explique-t-il.
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