Ouganda : à peine réélu, le président déjà chahuté

Paru le 16 Mai 2011
dans Ouest-France http://www.ouest-france.fr
Localisation : Afrique

Début de quatrième mandat très difficile pour Yoweri Museveni, l'autoritaire chef de l'État,confronté aux manifestations contre la flambée des prix des denrées de base.

De notre correspondant en Afrique de l'Est

Ce n'est plus tout à fait la douce brise venue du lac Victoria. Depuis un mois, la figure tutélaire de l'Ouganda, Yoweri Museveni, 66 ans, dont vingt-cinq au pouvoir, est confrontée à un mouvement de contestations. Réélu le 18 février pour un 4e mandat, avec 68 % des suffrages, l'ancien chef de la rébellion « accepte les manifestations mais dans la discipline ».

Malgré la répression qui a déjà fait neuf morts et les centaines d'arrestations, les velléités de son opposant historique et ancien médecin personnel, le Dr Kizza Besigye, ne faiblissent pas. Arrivé second de la présidentielle de février, ce dernier appelle, depuis le 11 avril, à des marches de protestation à travers le pays contre la vie chère et « un président illégitime rejeté par le peuple ». Sur fond de sécheresse et de « dépenses gouvernementales extravagantes » selon Besigye, l'Ouganda connaît une inflation galopante, avec des hausses de prix de 30 % dans l'énergie, l'alimentation ou encore les soins.

Le mécontentement est profond, comme le confirme Salamu Musumba, vice-président du Forum pour le changement démocratique, le parti de Kizza Besigye : « Les protestations continueront tant que les denrées de base, utilisées par la grande majorité des Ougandais, n'auront pas retrouvé leurs valeurs initiales. »

À cette conjoncture difficile, s'ajoute le rejet croissant de l'autorité de Museveni par une jeunesse éduquée mais au chômage. Si 400 000 jeunes sortent diplômés des universités chaque année, seulement 20 000 offres sont à pourvoir sur le marché de l'emploi ougandais.

Face à cette contestation, Yoweri Museveni a réagi d'une surprenante façon, jeudi, jour de sa très onéreuse cérémonie investiture : il a enjoint l'armée d'arroser de peinture rose les manifestants du centre de Kampala, la capitale. Cérémonie éclipsée par le retour au pays de Besigye, soigné au Kenya après avoir été blessé lors d'une manifestation il y a deux semaines. Tandis que Museveni était sifflé et l'investiture écourtée, son opposant était acclamé par des milliers de partisans massés le long de son trajet, en décapotable, entre l'aéroport et la capitale.

Arnaud BÉBIEN.